Saturday, March 24, 2007

13.03

La Vallée des Rois, sur la rive ouest du Nil, le domaine des morts, puisque le soleil y meurt chaque soir. Les pharaons du Second Empire, soit de -1600 à - 1000 environ, se faisaient enterrer ici, face à la nouvelle capitale, Thèbes, dans des tombes cachées dans la montagne. L’idée était d’être discret, pour éviter les pillards qui avaient, déjà à l’époque, vidé depuis des siècles les pyramides de Basse-Egypte des trésors qu’elles contenaient. Peine perdue, puisque les tombes de la vallée du Nil subirent d’ailleurs pour la plupart le même sort. Pratiquement la seule dont le contenu soit arrivé jusqu’à nous est celle de Toutankhamon. Son découvreur, l’archéologue britannique Tom Carter, en avait surtout conçu une immense amertume: si la tombe d’un un pharaon aussi insignifiant et falot que Toutankhamon, mort à 18 ans à peine, recelait de telles merveilles, peut-on seulement imaginer ce que les pillards ont trouvé dans celle de Ramses II, par exemple?


Les ancêtres des habitants du village de Gournah ont longtemps tiré profit du pillage des tombes, puis ont reconverti les sépultures en bergeries ou dépotoirs. Aujourd’hui toutes les maisons vont être rasées, et leurs habitants déplacés. La vengeance des pharaons…?

Le temple de, devinez qui? Ramsès II!



L’armée de Ramsès en train de mettre une belle raclée à ses ennemis.

Le temple de la reine Hatchepsout, totalement unique dans son architecture, a la modernité est encore soulignée par un restauration plutôt radicale (on peut presque parler de reconstruction).

Monday, March 19, 2007

12.03.07

Il ne faut pas croire que tout est facile pour le voyageur sur le Nil. Il faut souvent commencer par un déjeune frugal sur une terrasse quelconque…

…devant un paysage triste a mourir...

…puis subir des visites de vieilles ruines (quel ennui!)…

…et terminer par fumer une chicha dans le souk pour tenter d’oublier sa terrible lassitude (bon, en fait, juste une seule fois, pour essayer).

C’était la rubrique «rien envie d’écrire aujourd’hui». Je vous laisse, j’ai piscine.

11.03.07


Louxor, hassle-city. Impossible de faire un pas dans la rue sans se faire héler. «Hello my friend! Welcome! What’s your name? Where you from? Calèche? Taxi? Scouze mi!.Want to see my shop? Haschish? Scouze mi sir! Hey!» , etc. Je ne comprend pas que ce genre de parasites ne comprennent pas, depuis 200 ans qu’ils vivent aux crochets des voyageurs occidentaux, que ce genre de harcèlement est totalement contre-productif.


Pour finir je préfère encore lézarder tranquille autour de la piscine
plutôt que d’affronter tous mes très envahissants «friends».


De là j’apercois le temple de Louxor, qui se trouve aujourd’hui
en plein centre de la ville moderne…


…gardé par des statues en granit noire représentant
(un peu comme d’hab‘) Ramsès II.




Il était relié au gigantesque complexe de Karnak,
près de 3 kilomètres plus loin, par une voie encadrée de chaque côté par..


…des centaines de sphinx à tête de bélier (à Karnak)…


…puis humaine (Luxor).

Une fois l‘an, au début de la saison des crues, une procession amenait en très grandes pompes (les anciens Egyptiens ne faisait jamais les choses en petit) la barque solaire du dieu Amon du second temple vers le premier, pour qu’il y retrouve son épouse Mout. En s’unissant à elle, le dieu fertilisait toute l’Egypte. Sans doute la plus grandiose chambre à coucher du monde.


Karnak est absolument colossal, alors même qu’il doit être au 2/3 en ruines.


Commencé il y a près de 5000 ans, c’est le plus grand complexe religieux
jamais construit par l’homme.

La salle hypostyle: 134 colonnes de 23 mètres de haut
et 10 mètres de circonférence à la base.

Sous le Second Empire (il y a 3500 ans), il s’étendait déjà sur 100 hectares
et plus de 8000 prêtres y officiaient en permanence.

Pendant des siècles, chaque pharaon ajoutait une dépendance,
une chapelle, une obélisque,
faisant de Karnak un chantier permanent.

10.03.07

Débarqué au pied du temple de Komombo l’aube. De loin, on voit déjà les hordes de touristes vomis par les grands hôtels flottants qui croisent sur le Nil (plus de 600 entre Luxor et Assouan) monter à l’assaut du temple. Il s’agit d’une construction récente à l‘échelle de l‘Egypte antique, ce qui signifie qu’elle a juste un peu moins de 2500 ans…Il est vrai que les grandes pyramide de Gizeh remontent à 4500 ans, quant au sphinx (dont j’ai l’intime conviction, après l’avoir vu, que sa tête actuelle n’est pas celle d’origine, mais une modification bien ultérieure), son origine se perd carrément dans la nuit des temps.

L’Egypte donne le vertige. Il y a 5000 ans, alors que le reste du monde chassait pour ainsi dire encore des bêtes velues avec des armes en silex, ici une civilisation organisée creusait des milliers de canaux, une administration tenait des registres centraux détaillée, des architectes bâtissaient des villes structurées selon un plan digne de l’utilitarisme américain ou chaux-de-fonnier (carrées, avec un quadrillage régulier de rues à angle droit) et des dizaines de milliers d’ouvriers construisaient les monuments les plus colossaux de l’humanité, dont on n’a toujours pas percé tous les mystères aujourd’hui. Je suis toujours sidéré de voir par exemple que certaines galeries des pyramides restent inexplorées à ce jour. Si j’étais Bill Gates, je sais où j’investirais mes milliards. Fuck l’humanité, à quoi bon accélerer une explosion démographique déjà catastrophique, je veux savoir ce qui se cache sous le sphinx!

Et bien entendu, on ne pourra sans doute jamais expliquer pourquoi l’alignement des pyramides reproduit exactement celui des «pyramides de Mars», ces montagnes martiennes aux formes étranges photographiées par Voyager il y a une décennie seulement… Ni bien d’autres «coïncidences» cosmico-telluriques, ni les connaissances astronomiques, ni l’usage généralisé du nombre d’or, ni les propriétés allégués de la forme pyramidale (qui retarderait le pourrissement de la matière organique, entre autre), etc. Quoi qu’il en soit, il est impossible de ne pas penser que les Egyptiens étaient les légataires d’un savoir encore bien plus ancien, et sans doute bien plus vaste encore.

L’art du Haut-Empire se distingue des productions plus tardives par des hiéroglyphes…

…et des images sculptés en relief, et non en creux…

…comme cet exemple de la Vallée des Rois à Thèbes (Louxor).

Friday, March 16, 2007

08-09.03.07: en felouque sur le Nil

Remontée du Nil en felouque.

Paysages incroyables...

...désert ocre qui plonge dans l’eau turquoise d‘un côté...

...champs verdoyants sous les palmiers de l‘autre...

...ciel bleu foncé, calme et silence.

Un vieux yachtmen néo-zélandais qui voyage depuis deux ans avec sa femme tente de m’expliquer comment un bateau à voile peut avancer en faisant face au vent, puisque le vent du Nil souffle toujours du Nord au Sud: en fait le bateau est porté par l’air exactement comme un avion, grâce à la différence de surface entre les deux côtés de la voile du fait du gonflement, enfin c’est-ce que j’en ai compris. Ah oui, d’accord! J’essaye de prendre l’air éclairé du type qui a parfaitement compris la démonstration. Mystères insondables de la physique…

Le vent, tiède pendant la journée, redouble et devient carrément froi à la nuit tombé.


Comme un idiot, je suis pieds nus, en short et pull léger, avec toutes mes affaires dans mon grand sac, hors d’atteinte dans la soute. Le vent passe à travers la misérable couverture puante dont je tente de me recouvrir comme si elle n‘existait pas. Jamais eu aussi froid de ma vie. Nuit interminable.

Du coup je ne rate pas le lever du soleil, que j’attend roulé en boule depuis des heures.

Akhénaton, le pharaon hérétique au physique d‘extraterrestre, avait tenté d’imposer le culte d’Aton, dieu solaire unique, au lieu du panthéon de dieux dominé par Amon, et surtout par un clergé richissime et corrompu (étonnant, non). Son signe était un disque solaire dont les rayons se terminaient par des mains, distributrices de vie. Ce matin, je saisis particulièrement bien ce qu’il voulait dire.

Thursday, March 15, 2007

07.03.07: L'Argonath de Nubie


Abou Simbel, le fameux temple creusé dans la montagne par Ramsès II en l’honneur de Ramsès II, divinisé par lui-même et de son vivant.

Totalement mégalomane, d’une beauté et d’une puissance à couper le souffle.
Ici le second temple, en l’honneur de son épouse préférée (sur pres de 150), Nefertari, assimilée a Athor, la Venus/Freya égiptienne.


Les statues colossales qui en gardent l’accès, le visage serein tourné vers le soleil levant, évoquent bien sûr pour le fan du Seigneur des Anneaux les immenses Argonaths du Gondor.

Les bas reliefs à la gloire du pharaon conquérant et de sa victoire (plus proche du match nul en fait) sur les Hittites sont d’une telle beauté, d’une harmonie si parfaite et totale qu’on ne sait plus quoi en dire. On pourrait croire qu’ils ont été gravés hier - sauf que si c’était le cas ils ne seraient de loin pas aussi beaux.

Et tout au fond du temple, passé les rangées de sentinelles de pierre souriants et énigmatiques et les quatre portes successives, dans l’obscurité du saint des saints auquel seul Ramsès et les grands prêtres avaient accès une fois l‘an, la vision des trois dieux et du roi assis droits face à nous et nous regardant, est si solennelle, si impressionnante, qu’elle arrive même à faire taire les touristes en shorts. Sûrement pas le moindre des exploits du pharaon immortel.

06.07.07: Philae, l'ultime bastion

Arrivé par le train de nuit à Assouan, dernière ville du sud, capitale de la Nubie, pays fantôme entre la Haute-Egypte et le Soudan, porte de l’Afrique. Oublié mon appareil photo lors de la visite du temple de Philae, un temple de la période ptolémaïque (= tardive) demonté, déplacé et reconstruit pierre par pierre lors de la construction du fameux Grand barrage qui devait donné naissance au lac Nasser. Le dernier temple égyptien en activité: au IVe siècle de notre ère on y célébrait encore le culte d’Isis. L’empereur finit évidemment par s’émouvoir ces sorcelleries païennes, les derniers prêtres furent massacrés, le temple reconverti en église et les chrétiens entreprirent de détruire à coup de marteaux toutes les images des anciens dieux qui recouvraient les murs du temple, ainsi que toutes les représentations de parties de corps nus. Heureusement, ils devaient être encore plus paresseux qu’abrutis puisqu’ils se sont arrêtés à peu près à la moitié.

Ce temple me parle. J’ai toujours eu une irrésistible sympathie pour les résistants (surtout quand tout espoir est perdu) et les perdants de l’Histoire. Le sphinx aussi a été défiguré par l’artillerie des mamelouks musulmans, qui n‘aimaient pas son sourire. Et nos dieux, à nous Européens, maudits et oubliés, nos arbres sacrés abattus, nos lieux de culte rasés et recouverts par des églises, nos prêtresses brûlées… le monothéisme abrahamique, plus grand fléau de l’humanité?

Tuesday, March 13, 2007

05.03.07: Le Caire, ville entropique


Après quelques jours d’adaptation, je commence à être sensible aux charmes du Caire et à m‘y sentir à l‘aise. Malgré la pollution et le bruit du trafic, la promenade au bord du Nil le soir est superbe, la vue sur les tours et les hôtels illuminées de l’île de Gezira magnifique.
Finalement, dans dix ans au plus, Barcelone ou Marseille
ressembleront exactement au centre du Caire.

En ce sens, le Sud est bel et bien l’avenir du Nord.

Les chauffeurs de taxi sont partout pittoresques, ceux du Caire ne font pas exception. L’un n’avait non seulement aucune idée de ce que les termes «pyramides! Gizeh! Sphinx! Kheops! Khephren! » pouvaient bien signifier, mais même après se l’être fait traduire par un collègue, ignorait totalement où ces vieux tas de pierres pouvaient bien se trouver. Sans bien entendu vouloir me l’avouer à aucun moment. L’autre écoutait en boucle des sermons coraniques psalmodiés sur cassette, montant le son à l’arrière après m’avoir embarqué. Et oui cher barbu, je suis un infidèle et rôtirai en enfer pour l’éternité pendant que tu te taperas des vierges dans un jardin de roses, mais en attendant, je t’emmerde.

Monday, March 12, 2007

04.07.07: mosquées et pyramides


Les mastabas à degrés de Saqqarah sont considérées comme les premiers «prototypes» de pyramides.

L’extrême banlieue qui ronge à toute vitesse les derniers champs entre le Caire et les mastabas de Saqqarah est ce que j’ai vu de plus sinistre jusqu’ici. Des cartons à chaussures de 5 mètres sur 10 en briques rouges, totalement clos sur trois côtés, empilés les uns sur les autres n‘importe comment, reposant sur un sol boueux jonché de détritus. Aucune lumière dans les passages, aucune parabole sur les toits, même la télé est un luxe. Si la foi est inversement proportionnelle au désespoir, l’intégrisme est promis à un avenir brillant ici.

De toute façon, 98% des femmes (estimation personnelle) portent au minimum le foulard, et on ne croise pour ainsi dire aucune jeune fille de moins de vingt ans la tête nue. La jeunesse aime Allah. Beaucoup de jeunes hommes arborent cette marque brunâtre sur le front qui signale l’homme pieux. Je ne peux pourtant m’empêcher de considérer quelque un qui se frotte le front contre le sol à longueur de journée comme un malade compulsif.
La mosquée El-Azhar.

La mosquée Mohammed-Ali (moi j'dis, champion de boxe, sultan... quel type quand même)...

… au cœur de la citadelle bâtie par Saladin pour protéger la ville des Croisés.

Les mosquées du sultan Hassan et Er-Rifaï, où repose entre autres le dernier roi d’Egypte et le dernier shah d’Iran, vues depuis la citadelle.

La mosquée Al-Khamiliya (sauf erreur)…
…à moins que ce ne soit celle-ci.

Le Caire a pourtant dû être un jour une ville séduisante au confluent de l’Orient et de l’Occident, à taille humaine, à l’atmosphère respirable, où les Egyptiennes avaient le droit d‘être belles et où les compteurs des taxis fonctionnaient tout comme le reste. Partout on voit encore les traces décrépites d’un bref «âge d’or» remontant aux années 50-60. La période Nasser. De toute façon une période où le monde devait être plus beau, fonctionner mieux, croire en son avenir. J’envie un peu mes parents, qui m’ont précédé devant les pyramides à une époque où elles étaient encore en plein désert, mais me console en pensant à ce qu’il restera à voir à la génération après moi. L’enlaidissement du monde, voilà la vraie tragédie.
Quand on imagine les pyramides telles qu’elles étaient il y a 4500 ans, immaculees, blanches et lisses…
...couronnées du pyramidion d’or et d’argent…

…entourées d’esplanades immenses, de temples aux couleurs vives, de jardins et de canaux d‘eau pure…
…on mesure tout le chemin parcouru par l’humanité (très chouette son et lumière, cela dit).

Je ne pense pas être le premier touriste à m’être fait prendre en photo à cet emplacement.

La barque solaire retrouvée enterrée dans un coffre de pierre au pied des pyramides, devait permettre au pharaon de faire de l’aviron dans l’eau-delà.