Saturday, March 10, 2007

03.03.07: Le Caire

En arrivant dans une ville, j’aime commencer par m’y promener sans autre but que d’y regarder vivre ses habitants. Dans une mégapole grouillante comme Le Caire, c’est déjà une aventure. Traverser simplement la route, par exemple, n’est pas une mince affaire et tient de la tauromachie. Il faut guetter soit un « trou » dans le trafic, soit un ralentissement de celui-ci et se jeter sans hésiter tout en sachant qu’il est hors de question qu’une voiture ralentisse ou ne fasse ne serait-ce qu’un écart pour éviter un piéton, même sur un passage évidemment. Il s’agit donc de calculer sa trajectoire et, une fois lancé, de ne jamais hésiter ni faire marche arrière, ce qui serait pire que tout. Pour ma part j’essaye tout de même de me coller discrètement derrière un Cairote quant il s’agit de traverser un giratoire à quatre pistes.

Le musée égyptien est une merveille poussiéreuse dont l’agencement n’a pas dû changer depuis son ouverture en 1901. Un vrai musée comme dans les vieux Tintin, austère et encyclopédique. Il est clair qu’avec un tel contenu, inutile de déployer des trésors de séduction. Dès l’entrée, les deux statues colossales d’Aménophis III et de sa femme en imposent. Je m’y promène au hasard, passant à côté sans doute bien des merveilles. De toute façon, impossible de rater le clou de l’exposition, le trésor de Toutankhamon.

A la vue de toutes cette splendeur, ces œuvres d’art belles à couper le souffle, ces sarcophages d’or enchâssés les uns dans les autres comme des poupées russes, on a le sentiment que les Egyptiens étaient plus préoccupés par la mort et l’au-delà que par la vie. Paradoxalement, c’est précisément cela qui a rendu leur civilisation immortelle. Et c’est aussi la raison pour laquelle la nôtre ne laissera, à l‘inverse, aucune trace.

Au sortir du musée, je pars en direction du Khan El-Khalili, le grand souk du Caire. Je me perd complètement, m’enfile dans des ruelles bordées de magasins, à gauche, puis à droite. Chacune a son thème: lampes et luminaires, décorations pour gâteau de mariage ou plantes en plastique. Suis-je déjà dans le bazar? J’imaginais quelque chose de plus pittoresque, et peut-être un peu plus touristique, je dois avouer que la vue d’un couple de retraités en bobs et shorts me rassurerait.


Je débouche sur une grande route congestionnée de trafic d‘où s‘élève un nuage noirâtre.

Les trottoirs sont envahis par les petits vendeurs de culottes ou de produits ménagers, de sac à main ou de livres usagers, les magasins de robes fluorescentes pour petites filles ou de tableaux animés lumineux vomissent leur contenu jusque sur la route. Je zigzague entre des femmes transportant une télévision sur la tête et des barbus en pyjamas qui sifflent comme des serpents en me croisant. L’air est irrespirable, les yeux brûlent, on me bouscule. Je décide de faire demi-tour, mais me perd encore un peu plus profondément dans des passages de terre battue entourés d’immeubles en ruine sans jamais avoir été terminés et qui n’ont jamais dû voir passer d’Occidental avant moi.
Le soir tombe. Je commence à me sentir nerveux. Je me console en me disant que je pourrais être une femme, une jolie blonde dans le pire des cas.

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